Histoire de la famille
Ces anecdotes historiques ont toutes été soumises par Eleanor Abbey. Eleanor est l’arrière-petite-fille de R. W. et Mary Cecilia Shepherd et la sœur de feu Marg Peyton, première présidente du conseil d’administration de Greenwood.
Table des matières
Introduction
Au cours de cette “leçon d’histoire”, vous en apprendrez un peu plus sur les cinq générations de personnes qui ont vécu à Greenwood.
Jean-Baptiste Sabourin a commencé à coloniser la propriété de Greenwood en 1732. La propriété originale des Sabourin est toujours là et fait partie de la maison. La propriété est restée aux mains des Sabourin jusqu’en 1820. À l’époque, John Mark Crank Delesderniers en a fait l’acquisition. Il voulait en faire à la fois une résidence pour son fils, Peter Francis Christian, un magasin général et un comptoir commercial. Dans les années 1840, il a été le premier bureau de poste de la région. Greenwood a été étendu vers l’est à deux reprises, dans les années 1820 et après 1860.
Greenwood est resté dans la famille Delesderniers jusqu’au décès de Phoebe Nobbs Hyde en 1994. Parmi les ancêtres notables de la famille, citons R.W. Shepherd, cofondateur de la Compagnie de navigation de la rivière des Outaouais, le Dr Francis Shepherd, doyen de la faculté de médecine de l’Université McGill pendant de nombreuses années, et Percy Nobbs, l’un des architectes les plus en vue du Canada. Un certain nombre de descendants de Delesderniers-Shepherd vivent toujours dans la région de Hudson et continuent à s’impliquer dans Greenwood.
Le domaine de la famille Sabourin
Ces terres avaient une largeur d’environ deux champs et s’étendaient de la rive du lac des Deux Montagnes à ce qui est aujourd’hui la route 342 (Harwood).
En échange de ses terres et de la protection du seigneur, Jean-Baptiste Sabourin, en tant que censitaire, doit au seigneur une redevance substantielle. Jean-Baptiste devait fournir une corvée (trois ou quatre jours par an de travail non rémunéré, comme le défrichage, la construction ou l’aide à la récolte), ainsi qu’un loyer annuel. En plus de ces droits, il devait partager une partie du bois provenant de ses terres et du poisson pêché sur son littoral.
Le livre de comptes de Jean-Baptiste n’est cependant pas encore clair. Son seigneur avait également droit à un “droit de mouture”. Cela signifie que 1/14e du grain que Jean-Baptiste a moulu au moulin seigneurial de Vaudreuil y restera.
C’est en pensant à ces obligations que Jean-Baptiste et son épouse, Sarah Hanson, auraient défriché des terres et établi leur ferme. Au fur et à mesure de l’évolution de leur exploitation, ils ont gardé quelques animaux pour se nourrir et se vêtir. Leurs principales cultures étaient le maïs, le blé, l’orge, le sarrasin et l’avoine.
Avant de passer aux détails concernant la maison familiale, il est intéressant de glisser quelques notes secondaires dans l’histoire à ce stade…
Jean-Baptiste a jonglé avec deux autres occupations exigeantes au cours de sa vie. Il est capitaine de la milice, commandant en second après le seigneur, pour la seigneurie de Vaudreuil. Jean-Baptiste était également commerçant. Au cours des mois d’hiver, en tant que coureur de bois, il s’est procuré plusieurs types de peaux d’animaux. La peau de castor était particulièrement lucrative car elle était très appréciée des Européens à cette époque.
La rivière des Outaouais, autrefois appelée “la rivière des Algonquins” et principale voie de passage des canoës des Nipissings, des Algonquins, des Hurons et des Mohawks, est devenue la route commerciale de la traite des fourrures. En effet, non loin du lot de Jean-Baptiste, plus en amont de la rivière près de Carillon, l’explorateur français Samuel de Champlain aurait passé la nuit sur la rive. Il cherchait non seulement des peaux de castor, mais aussi une voie d’accès à la Chine !
Hudson a la chance d’avoir un rappel d’une ancienne tradition lancée par un autre des explorateurs les plus connus du Canada, Jacques Cartier. Lorsque Cartier se rend au Canada, il plante cinq croix, au nom du roi de France, entre Gaspé (1534) et Trois-Rivières (1536). Les bûcherons canadiens-français installent également des croix le long de leurs routes. Pour eux, les croix avaient une fonction religieuse et marquaient la possession d’un territoire. La croix de chemin, située en face de Greenwood, est une réplique de l’original des années 1870 (qui fait maintenant partie de la collection du Centre). Il était autrefois situé plus à l’est, près de l’actuelle auberge Willow Place. Vous le remarquerez la prochaine fois que vous passerez devant Greenwood en vous rendant au centre commercial de Hudson ou en en revenant.
Jean-Baptiste et Sarah ont construit un simple bâtiment à ossature. Le rez-de-chaussée est agrémenté d’une grande cheminée. Ce foyer était le centre de l’activité de la maison, du chauffage à la cuisine en passant par la lessive. Un escalier raide mène aux chambres à coucher, avec un grenier au-dessus. C’est là que vivait une famille de dix enfants : Paul, Jean-Baptiste, Marie-Anne, Catherine, Catherine Laurette, Marie Elizabeth, Charlotte, Pierre, Elisabeth et Thérèse Amable.
Lorsque tous les enfants sont mariés, les Sabourin sont considérés comme des “personnes influentes”. La position de Jean-Baptiste en tant que capitaine ajoute à leur statut au sein de la communauté. Les Sabourin et leurs descendants vivront à Greenwood pendant près d’un siècle.
La cuisine à cheminée
Dans la dernière section, nous en avons appris un peu plus sur Jean-Baptiste Sabourin et son épouse, Sarah Hanson. Ensemble, ils ont défriché le “lot 16” et construit une ferme pour leur famille de huit personnes. Leur modeste bâtiment à ossature est la plus ancienne structure restante de l’ancienne seigneurie de Vaudreuil et de la section originale de Greenwood. C’est également le point central de cette partie de l’histoire. Entrez donc à l’intérieur. Nous nous rendons directement dans la pièce appelée “Cuisine du feu”.
À l’époque de Jean-Baptiste, il s’agissait de la pièce principale de sa maison. Le large plancher en pin, les plaques de cheminée en ardoise, les poutres brutes du plafond et l’impressionnante fondation en pierre sont tous d’origine.
Par la porte du sous-sol, vous pouvez voir l’épaisseur des planches inégales. Le sous-sol présente également le style original de construction à poteaux et à poutres. Un escalier étroit et raide mène au deuxième étage, qui servait probablement de chambre à coucher. Les fenêtres du côté nord donnent sur le lac des Deux Montagnes, tandis que celles du côté sud donnent sur ce qui est aujourd’hui la route principale de Hudson.
Une grande cheminée en pierre est le point central de la pièce. Les bras en fer sont aujourd’hui inutilisés mais, à une certaine époque, ils auraient supporté toute une série d’ustensiles. Le foyer devait être un lieu de vie très animé. Les activités allaient de la préparation et de la cuisson des repas au lavage et au séchage des vêtements, en passant par la seule source de chaleur de la famille. Lors des soirées d’hiver glaciales, j’imagine que les Sabourin devaient s’asseoir le plus près possible de l’âtre.
Un poêle en fonte a été inséré dans la cheminée par Phoebe à un moment donné. Ce poêle, c. 1810-25, a probablement été fabriqué à la Forgerie St. Il chauffait à l’origine une autre partie de Greenwood et remonte à l’époque de la famille Delesderniers (vers 1850).
Près de l’avant de la cheminée se trouve un fauteuil à bascule. Phoebe, une actrice professionnelle, s’asseyait dans ce fauteuil lorsqu’elle jouait son monologue de Sarah Hanson. Comme il a dû être facile pour elle de se glisser dans ce rôle. Après tout, c’était la cheminée de Sarah, où elle passait la majeure partie de son temps éveillé !
Au centre de cette pièce, vous êtes frappé par la diversité des objets qui vous entourent. Contrairement à de nombreuses autres demeures historiques, Greenwood n’organise pas ses pièces par date. Greenwood reflète les nombreuses transformations qu’il a subies au cours de cinq générations… une propriété familiale, un poste de traite/magasin général, un bureau de poste, une résidence d’été, une résidence à l’année et maintenant un “musée de la famille”.
Lorsque vos yeux se promènent dans la pièce, tant de beaux objets vous incitent à vous arrêter… l’armoire murale en pin, le rocking-chair rouge sans bras d’Amelia Delesderniers (née Rice), l’armoire d’angle en pin, les palettes à beurre, le chaudron en fer, les fers à repasser, la soupière Wedgewood bleue et blanche, les raquettes à pattes d’ours, la ceinture en pointe de flèche, les aquarelles de Greenwood, les cloches de traîneau, la lanterne nautique en cuivre, le canapé regency tapissé d’or et rembourré de crin de cheval, et la liste n’est pas finie ! Il n’est donc pas étonnant que la cuisine à foyer soit un lieu de prédilection pour de nombreux visiteurs !
Pendant les mois d’été, Greenwood organise des visites guidées de la maison, avec thé et friandises sous la véranda. La Fireplace Kitchen suscite toujours des discussions intéressantes sur le qui/quoi/quoi/où de ses différents artefacts. En décembre, la chaleur et la beauté naturelles de cette pièce sont mises en valeur lors de l’événement annuel “Old Fashion Christmas” de Greenwood. Mettez un arbre de Noël spectaculaire, de belles décorations, du cidre chaud, de la musique, des spectacles de lecture et des gens sympathiques tous ensemble dans la Cuisine du Foyer et vous obtiendrez quelque chose de magique.
À ce stade, nous allons déplacer notre machine à remonter le temps jusqu’en 1821. John Mark Crank Delesderniers a acquis la propriété des Sabourin. Il le vend à son fils, Peter Francis Christian, pour y installer le comptoir familial. Nous découvrirons ensuite la raison pour laquelle la femme de Peter, Amelia Rice, a nommé la maison “Greenwood Cottage” lorsqu’ils ont déménagé en 1824.
Mary Cecilia Delesderniers Shepherd
Swiss Cottage
Plusieurs lettres entre elle et ses parents, écrites lors de ses années à Montréal, font aujourd’hui partie des archives de Greenwood. Les lettres qu’Amélia envoyait à Mary étaient remplies d’événements journaliers s’étant déroulés à Greenwood, par conséquent ces lettres représentent une mine précieuse d’informations. Elles discutaient au sujet des invités de Greenwood, des chats de Mary, des tendances vestimentaires, ainsi que des études de Mary.
Lorsqu’elle eut 16 ans, elle a rencontré son futur époux, M. Robert Ward Shepherd. À cette époque, il travaillait sur un bateau à vapeur circulant sur la rivière des Outaouais.
Robert Ward Shepherd
Shepherd nous raconte qu’il dansa avec elle toute la soirée au Schneider’s Inn, qui se trouvait juste à côté de la maison Greenwood. Le matin venu, les Delesderniers se sont joints à leurs invités dans leur trajet menant chez Cushning. En chemin, ils se sont arrêtés à St-Andrews pour diner avec le père d’Amélia Rice, Dr Abner Rice, pour ensuite arriver à destination juste en temps pour le thé. Nous ne savons pas pour quelles raisons ils ont été invités chez les Cushning, mais ils y sont restés quelques jours.
Sur le chemin du retour à Como, le Capitaine Shepherd eut le plaisir d’être accompagné par Mary-Cecilia sur son traineau, ce qui rendit les autres jeunes hommes très jaloux.
On their return to Greenwood, Captain Shepherd was invited to stay on for a couple of days. He had known the family from his several visits
De retour à Como, M. Shepherd fut invité à rester chez les Delesderniers pendant quelques jours. Il connaissait préalablement la famille Delesderniers, du fait qu’il fréquentait souvent le Schneider’s Inn, mais il n’avait jamais rencontré Mary avant cette date. À partir de cette rencontre toutefois, il passa de plus en plus de temps avec la famille Delesderniers, incluant la belle Mary, notamment lors de leurs séjours à Montréal.
Au cours de l’hiver suivant, M. Shepherd se rendit souvent à Carillon pour y acheter du bois afin de construire ses nouveaux bateaux. Étant donné que ce trajet ne pouvait se faire en un jour, il s’arrêtait toujours à Greenwood en chemin vers Carillon, ainsi que sur le chemin du retour.
En 1846, le Capitaine Shepherd fut enfin capable, avec l’aide de quelques amis, de se procurer le bateau à vapeur qu’il nomma « Oldfield », dont il prit immédiatement les commandes. C’est ainsi qu’il mit sur pied le « Ottawa River Navigation Company », qui faisait des allers-retours entre Montréal et Ottawa sur la rivière des Outaouais. Une fois ces affaires en ordre, il passa le temps des fêtes avec la famille Delesderniers à Greenwood, et fut les arrangements nécessaires pour faire de Mary son épouse bien aimée.
Robert W. Shepherd et Mary Cecilia Delesderniers se sont mariés le 8 février 1847 à l’église St James, à Como. Il avait 28 ans et elle 21 ans. La robe de mariage de Mary Cecilia ainsi que le veston de M. Shepherd sont toujours conservés au Centre Greenwood.
Ensemble, le couple eut 10 enfants, dont 9 qui se sont rendus à l’âge adulte. L’ainé, Robert Ward Jr., est né à Greenwood en 1848, qui était la résidence principale de la famille, alors que Riversmead était en train d’être construite. Les 9 autres enfants sont nés à Riversmead, le dernier naissant en 1868.
En rédigeant ses mémoires quelque 30 ans plus tard, Robert Shepherd écrit que le couple tardait toujours à vivre leur première chicane, il se considérait donc très chanceux d’avoir vécu un mariage si heureux. Il admet que Mary doit le trouver parfois un peu difficile, mais que sa nature amiable assurait la paix au sein de leur couple.
Riversmead
Les lettres qui nous ont été laissées, ainsi que ses mémoires si soigneusement écrites, nous indiquent que le couple aurait rarement été séparé l’un de l’autre. Ils ont souvent voyagé ensemble au cours de leur vie mature, passant le temps des fêtes sur la côte du Maine, en plus d’un très long voyage sur les iles Britanniques.
Après la mort de M. Shepherd en 1895, Mary Cecilia passa ses étés à Riversmead avec ses enfants, alors mariés, accompagné de ses petits-enfants. Elle continua de passer ses hivers à Montréal, où elle était propriétaire d’une demeure sur la rue Dorchester.
Mary avait hérité de Greenwood lorsque ses parents sont décédés, malgré qu’à cette date, tous ses enfants, qui étaient alors devenus adultes, avaient des maisons sur la propriété de Greenwood. Elle est décédée le 6 janvier 1901.
Robert Ward Shepherd (Capitaine)
(Prenez note… La plupart des informations sur les débuts de la vie de Robert Ward Shepherd proviennent des mémoires qu’il a rédigées en 1877, à l’âge de 58 ans. Malheureusement, ces mémoires ne racontent son histoire que jusqu’en 1860 de sorte que les détails des 35 années suivantes de sa vie sont plutôt sommaires, bien que nous ayons quelques-unes de ses lettres avec sa famille…)
En 1830, Robert, alors âgé de onze ans, et sa famille immigrent au Canada. Ils embarquent pour Québec le 26 juillet et y arrivent le 8 octobre – un voyage de deux mois et demi sur un voilier très inconfortable. Leur mère, qui avait passé des semaines à préparer toute la nourriture nécessaire pour la durée du voyage, s’est allongée dans sa couchette lorsque le navire a commencé à tanguer et y est restée jusqu’à leur arrivée à Québec.
Elle ne s’est jamais tout à fait rétablie et elle mourra à Québec l’été suivant. Le père de Robert se retrouve alors seul avec neuf enfants – l’aînée, une fille de quinze ans, et le plus jeune, un bébé d’un an.
Après la mort de son épouse, John se rend à Montréal avec tous les enfants, à l’exception de Robert et de sa sœur Mary qui restent chez des amis à Québec pendant une autre année. En 1832, Robert Ward Shepherd rejoint son père à Montréal et, comme il est le fils aîné, on s’attend à ce qu’il travaille alors qu’il n’a pas encore treize ans. Au cours des années suivantes, il occupe divers emplois qu’il décrit dans ses mémoires.
Plusieurs de ces emplois se trouvaient dans différents hôtels de Montréal, où il a acquis des connaissances approfondies en matière de comptabilité. À l’âge de dix-sept ans, il est commis principal à l’hôtel Ottawa et son salaire de la première année est de 9 $ par mois, pour grimper à 112 $, l’année suivante.
Alors qu’il travaille à l’hôtel Ottawa, Robert Ward Shepherd rencontre un jeune homme qui travaille sur un bateau à vapeur basé à Lachine. La possibilité d’obtenir un tel emploi intéresse Robert. Il postule alors auprès d’une compagnie de transport qui possède 13 bateaux à vapeur assurant la liaison entre Montréal et Kingston via la rivière des Outaouais et le canal Rideau. Il est engagé pour travailler sur le bateau à vapeur Ottawa sous les ordres du capitaine Robins de Cavagnal.
Robert a 18 ans. Après trois ans sur ce bateau à vapeur et voyant peu de chances d’avancement, il cherche un autre emploi et est bientôt engagé par une autre compagnie – cette fois pour prendre le commandement d’un de leurs bateaux à vapeur, le St. David.
Ottawa River Navigation Company
Au cours des 60 années suivantes, l’entreprise possède et exploite une vingtaine de navires à vapeur pour le transport de passagers et de marchandises sur la rivière des Outaouais. Le capitaine Shepherd sera aux commandes de l’un des navires à vapeur jusqu’en 1853 et, après sa retraite de la navigation à vapeur active, il devient d’abord directeur général de la société, et président par la suite, poste qu’il occupera jusqu’à sa mort en 1895.
En 1847, Robert Ward Shepherd épouse Mary Cecilia Delesderniers dont la famille s’est établie à Cavagnal au début des années 1800. Les Delesdernier vivent à Greenwood où le jeune couple réside pendant la première année de leur mariage et où leur fils aîné, R.W. Shepherd jr. voit le jour. En 1848, ils s’installent à Riversmead que le capitaine Shepherd vient de faire construire pour sa jeune famille.
Robert devient l’un des plus citoyens les importants de la région. Il fera une demande auprès du gouvernement de la province du Canada visant à donner un nouveau nom à cette région. Autrefois connue sous le nom de Cavagnal, elle devient, à des fins postales, dans les années 1850, l’Ottawa Glass Works, en raison de l’usine de verre qui s’y trouve.
Cependant, comme une grande partie du courrier est destinée à l’usine de verre d’Ottawa, Robert est déterminé à donner à sa région un nom plus approprié. L’autorisation du gouvernement est accordée et toute la région est désormais connue sous le nom de Como, appellation qu’il choisit puisque la région lui rappelle un peu le lac de Côme en Italie. Il écrit dans ses mémoires que « Como est situé sur un très beau lac, mais peut-être pas égal à celui de l’Italie » !
Lorsque le prince de Galles – futur Édouard VII – vient au Canada en 1860 pour la toute première tournée royale, il remonte la rivière des Outaouais sur le tout nouveau bateau à vapeur du capitaine Shepherd, le Prince of Wales. Le prince de 18 ans était de passage pour la cérémonie de pose de la pierre angulaire de l’édifice du Parlement à Ottawa, ainsi que pour l’inauguration du pont Victoria, récemment achevé. Le capitaine Shepherd participe à ces deux événements : en tant que propriétaire du bateau à vapeur sur lequel le prince a remonté la rivière des Outaouais et en tant qu’invité à l’ouverture du pont.
Au fil des ans, Robert Ward Shepherd sera impliqué dans de nombreux autres événements intéressants qu’il décrira dans ses mémoires, mais c’est sa relation avec Greenwood qui restera la plus importante.
Par la suite, tous ses enfants mariés – sauf un – vivront à Montréal et passeront leurs étés à Côme, la plupart d’entre eux dans des maisons construites par Shepherd près de Riversmead. Son fils aîné, Robert Ward Jr., et sa famille passeront leurs étés à Greenwood pendant de nombreuses années.
Cette partie de Como était autrefois connue sous le nom de Shepherd Village. Robert et son épouse, qui vivent à Riversmead, sont entourés de huit de leurs enfants mariés et de leurs 20 petits-enfants.
À en juger par la quantité de lettres que nous possédons ici à Greenwood, les nombreuses références affectueuses à la famille évoquent clairement les liens étroits qui les unissaient.
Robert Ward Shepherd décède à Riversmead en 1895 et sera enterré au cimetière Mont-Royal. Mary Cecilia mourra à Montréal en 1901 et sera enterrée à côté de son mari.
Leur fils aîné, Robert Ward Shepherd Jr, héritera de Riversmead et leur plus jeune fils, Del, héritera de Greenwood après le décès de leur mère.
(Rédigé par Eleanor Abbey. Eleanor est l’arrière-petite-fille de R. W. et Mary Cecilia Shepherd et la sœur de feu Marg Peyton)
Mary Cecilia (Cecil) Shepherd
Mary Cecilia Shepherd, Cecil as she was called, was born to Dr. Frank Shepherd and his wife Lilias Torrance in 1881. She was named after her grandmother, Mary Cecilia Delesderniers Shepherd.
Cecil (pronounced Sissal) had an older brother Ernest, and a younger sister Dorothy. The family lived in Montreal during the winter months where their father was a renowned surgeon, a McGill professor, and the Dean of Medicine. The children also attended school there.
In the summers, the children enjoyed the delights of the Como shoreline with their many cousins from neighbouring houses… building hideaways with driftwood and even making a stone fireplace (quite against orders), where potatoes could be roasted! Nothing tasted more delicious than those potatoes with their smoky flavour, eaten beside the lapping water, away from disapproving eyes!
As the daily steamboat approached the Como Wharf, the children would row out and feel the swell of the wake under their skiff. Tugs with their barges loaded with logs and lumber might appear around Parson’s Point (today it’s known as Quarry Point). Sometimes on the foremost barge, there was a small cabin with washing hanging a line, a child or two and sometimes a dog and a smiling woman who waved to them.
La mère de Cecil est malheureusement décédée en 1892, alors que Cecil n’avait que 11 ans.
En 1909, Cecil et Percy Nobbs se sont mariés. Percy était un jeune architecte d’origine écossaise, devenu le chef du département d’architecture à McGill. Au cours des années 1920, le couple accompagné de leurs deux enfants, Pheobe et Frank passèrent leurs étés à Como afin d’y rénover la maison de Greenwood. C’est pendant ce temps, sous les yeux vaillants de Percy, que le jardin de Greenwood commença à s’épanouir, devenant avec le temps le jardin grandiose que nous connaissons aujourd’hui
Cecil passa tous ses étés à Greenwood, et ce jusqu’à sa mort, en 1971.
Texte recherché et écrit par Eleanor Abbey et traduit de l’anglais par Catherine Lalonde.Dr Frank Shepherd fut le deuxième fils et troisième enfant du capitaine Shepherd et de Mary-Cecilia Delesderniers.
Percy Nobbs (Percy Erskine Nobbs)
Percy Nobbs naît en Écosse. Les douze premières années de sa vie – de 1875 à 1887 – se dérouleront toutefois à Saint-Pétersbourg, en Russie.
Il étudie l’architecture à l’Université d’Édimbourg mais il laisse véritablement sa marque à Montréal lorsque l’Université McGill lui attribue le poste de Macdonald Chair of Architecture en 1903. Il rencontre sa future épouse, Mary-Cecil Shepherd, par l’entremise du doyen de la faculté de médecine de McGill, le Dr Frank Shepherd, père de cette dernière.
Percy Nobbs devient rapidement l’un des architectes les plus réputés de Montréal. Outre les huit nouvelles facultés réalisées pour l’université McGill, le musée McCord, le University Club de McGill sur la rue Mansfield et l’édifice médical Drummond sont quelques-uns de ses projets les plus importants.
L’architecte Nobbs a non seulement œuvré au Québec mais il a également réalisé les murs de plâtre décoratifs intérieurs de l’Université de l’Alberta, tout en dirigeant l’entraînement physique et la formation à la baïonnette des soldats envoyés outre-mer lors de la Première Guerre mondiale. Le travail réalisé par Nobbs à l’Université de l’Alberta est toujours considéré comme un exemple remarquable de décor intérieur. Il conçoit également les robes et les bonnets des demoiselles d’honneur de Cecil à l’occasion de leur mariage en 1909.
The Nobbs Room
Percy Nobbs a joué un rôle prédominant dans l’avènement du mouvement des Arts et Métiers – Arts and Crafts – au Canada. Rejetant avec mépris le style créé par le mouvement industriel, il croit fermement que les nouveaux édifices construits à l’époque doivent se fondre dans le décor, comme s’ils en avaient toujours fait partie en utilisant des matériaux naturels tels que le bois, la pierre et le fer forgé. L’édifice médical Drummond est un magnifique exemple de son travail du fer forgé et de la terre cuite.
En plus d’être un architecte reconnu, Percy Nobbs est un auteur et un artiste accompli, publiant des livres sur le design, la pêche au saumon ainsi qu’un guide de techniques d’escrime. Également athlète de renom, il remporte la médaille d’argent en escrime lors des Jeux olympiques de 1908. Passionné d’escrime, il pratiquera cette discipline jusqu’à l’âge vénérable de 80 ans.
Parmi ses œuvres d’art, on trouve sa représentation de l’illumination du Kremlin à l’occasion du couronnement du dernier Tsar de Russie, Nicolas II, et de l’impératrice Alexandra, événement auquel Percy a eu le privilège d’assister, sans oublier des peintures du jardin de Greenwood et de sa résidence de la rue Belvédère, à Westmount.
Percy Nobbs est également le fondateur de la Fédération du saumon d’Atlantique, – organisation au Nouveau Brunswick qui existe encore de nos jours – l’une des principales sources de financement pour la recherche sur la conservation et les habitudes des saumons. En 1952, il remporte le prix Outdoor Life Conservation, reconnu pour avoir été le plus grand donateur pour la cause de la conservation de la faune de l’année.
Percy Nobbs aura été sans contredit un homme d’avant-garde !
Texte original rédigé par Eleanor Abbey, arrière-petite-fille de R. W. et de Mary Cecilia Shepherd et soeur de Marg Peyton. (Traduction – Céline Pilon, 2021)
Phoebe Nobbs Hyde
Phoebe Nobbs Hyde, arrière-petite-fille de Robert Ward Shepherd et de Mary Cecilia Delesderniers, naît à Montréal en 1910.
Phoebe et son frère cadet, Frank, grandissent à Westmount mais passent leurs vacances d’été à Como avec leur grand-père, le Dr Frank Shepherd. Des journées fort agréables à pêcher avec leur grand-père, à faire des promenades en bateau et à se baigner dans la rivière des Outaouais – plus propice à la baignade à cette époque. Les routes n’étant pas pavées, le Dr Shepherd s’assure de faire asperger les chemins d’huile devant les maisons afin de réduire poussière soulevée par le passage des voitures.
Entre l’âge de 10 et 14 ans, Phoebe passe ses étés en Nouvelle-Écosse, où son père a une maison d’été. Como lui manque beaucoup et elle sera très heureuse lorsque sa famille décide de revenir passer l’été à Como, en 1924.
Comment Phoebe a acquis Greenwood
À son décès, en 1901, Mary Cecil Shepherd lègue Greenwood à Del, son fils ainé. Ce dernier réalise de grandes rénovations au cours des années suivantes, dont l’aménagement du Salon est de la maison ainsi que le hall d’entrée et la chambre à pignons située juste au-dessus du Salon est.
À la mort de Del en 1924 – son épouse avait obtenu un divorce à Reno au Nevada, procédure « inédite » à l’époque – Greenwood est déjà vendue à sa soeur, May Robertson, qui l’avait ensuite échangée avec le Dr Frank Shepherd pour Rose Cottage, maison acquise de son neveu quelques années auparavant et que May convoitait.
Le Dr Shepherd lègue ensuite Greenwood à sa fille, Cecil, la mère de Phoebe. Cette dernière, avec l’aide de son époux, fera de Greenwood en une magnifique résidence d’été grâce à des petits travaux d’entretien. La famille campe dans le jardin de Greenwood pendant les rénovations et utilise le patio de pierre comme cuisine d’été, expérience qui plait beaucoup à Phoebe.
Phoebe rêvait déjà, à 14 ans, de faire de Greenwood un musée. De nombreux artéfacts et trésors de famille sont exposés dans la maison et admirés aujourd’hui, encore.
Lorsque Phoebe termine ses études, elle est envoyée à Londres, en Angleterre, où elle suit une formation en art dramatique, l’une de ses grandes passions. À 18 ans – en 1928 – elle a déjà fait la rencontre de son futur époux, l’officier Andrew MacKellar, lors de son premier voyage à destination de Londres. Son père Percy exige qu’elle doit toutefois compléter ses études au Royal Academy of Dramatic Arts (RADA) avant de se marier. Le mariage sera seulement célébré au terme de six années de fiançailles. Phoebe a alors 24 ans.
Être l’épouse d’un capitaine de navire laisse entendre un style de vie très particulier pour une femme de l’époque. Le couple est propriétaire d’un appartement à Londres, mais Phoebe préfère passer ses étés à Como. Pendant la saison estivale, elle ne voit son époux que lors de ses courtes escales à Montréal, à peine quelques jours par mois.
C’est au cours de ses étés à Como que Phoebe monte des pièces de théâtre de Shakespeare dans le jardin de Greenwood. Sa grand-tante, May Robertson, contribue grandement à la réalisation de ces représentations, étant elle-même passionnée d’art dramatique. Pendant sept étés consécutifs, alors que la Guerre fait rage en Europe, les deux femmes mettent sur pied le Festival Shakespeare, mettant en vedette les jeunes – et moins jeunes – de Como. Cette activité, très appréciée par tous les participants, Phoebe leur enseignait les différentes techniques de l’art, la locution.
Phoebe leur enseigne différentes techniques d’art dramatiques et leur donne des cours d’élocution. Les participants découvrent ainsi les plaisirs de jouer dans des pièces de Shakespeare et autres dramaturges.
Eleanor Abbey, cousine de Phoebe, évoque ses impressions sur cette expérience :
J’ai eu la chance d’être l’une des jeunes à avoir vécu cette expérience, même si ce n’était pas tellement apprécié à l’époque, étant seulement âgée de 8 à 12 ans, mais aujourd’hui, en regardant en arrière, je me rends compte à quel point cette expérience a été des plus précieuses.
Phoebe a attiré toutes les personnes intéressées par ses pièces et elle en a recruté bien d’autres ! Tante May Robertson était de la génération de ma grand-mère et était souvent incluse. Tante May a brillé dans le rôle de l’infirmière de Juliette et a interprété le personnage principal d’une pièce sur une petite fille qu’elle a aidée à épeler un mot difficile – Mississippi – dans la grande épreuve. Nous, qui avons vu cette pièce, ne l’oublierons jamais.
Elle a été très patiente avec nos efforts de comédiens amateurs. Je pense qu’elle nous a fait apprécier Shakespeare, ce qui nous aura marqué pour la vie.
Après la guerre, Phoebe retourne en Angleterre et la vie reprend son cours. Elle donne des conférences sur le folklore canadien et amérindien dans des écoles ainsi qu’à des groupes de femmes. Entretemps, elle étudie également au Royal British Museum.
Elle revient chaque été au Canada et voyage fréquemment dans les contrées de l’Ouest canadien, où elle visite différentes communautés amérindiennes en vue de recueillir du matériel pour ses cours et ses conférences. C’est au cours de ses séjours dans l’Ouest qu’elle donne ses premiers monologues – One Woman Show – entamant alors une nouvelle période de sa vie artistique. C’est à cette époque où sa mère, Cecil, lui vend Greenwood.
Andrew MacKellar décède en 1959. Ses funérailles sont célébrées à l’église St. Mary’s. Une plaque commémorative marquée à son nom s’y trouve encore aujourd’hui.
En dépit d’avoir vécu une vie de couple plutôt marginale, Phoebe assure n’avoir jamais envisagé l’échanger pour une vie plus « normale ». Son seul regret est de ne jamais avoir eu d’enfants.
L’année suivant le décès de son mari, elle épouse Reid Hyde, son oncle adoptif. Il a 82 ans, elle en a 50.
Le couple voyage pendant l’hiver et passe l’été à Greenwood qui n’était pas encore hivernisée. Phoebe et son époux achètent la maison Rose Cottage de leurs cousins George et Marydel Robertson. Le couple Hyde y vit confortablement au cours des hivers suivants malgré l’état de santé fragile de Reid Hyde. Ce dernier meurt au bout de six ans de mariage.
Au cours des 30 années suivantes, Phoebe vivra en permanence à Hudson et s’intègre tout naturellement à la vie de sa communauté. Elle sera présidente de la Société historique de Hudson et du Hudson Garden Club. Elle monte également un spectacle annuel de fruits et légumes, en plus de contribuer à la publication de livres historiques, sans compter ses nombreuses heures de bénévolat à l’église St. Mary’s.
Femme débordante d’énergie, Phoebe aura eu une vie bien remplie. Aimant se tenir occupée, elle apprécie tout autant se prélasser autour de sa piscine en compagnie de ses amies et de ses proches.
Dans son testament, Phoebe lègue Greenwood à l’Héritage canadien du Québec, un organisme à but non lucratif dédié à la conservation de maisons et de propriétés situées au Québec, reconnues pour leurs attraits esthétiques et historiques. Greenwood est l’héritage que Phoebe lègue à la collectivité de Hudson et des environs. Son rêve d’enfant s’est bel et bien réalisé.
Un autre héritage est celui des transcriptions et des vidéos de ses monologues, certains datant de la période où elle vivait au Royaume-Uni. Elle incarne plusieurs personnalités canadiennes, dont Madeleine de Verchères, Jeanne Mance et Marguerite Bourgeoys.
Son monologue le plus célèbre est celui où elle incarne Sarah Hanson – l’épouse de Jean-Baptiste Sabourin, premier propriétaire de Greenwood – qui avait été capturée par des Indiens à l’âge de 16 ans et emmenée à Oka. Jean Baptiste avait payé sa rançon afin de pouvoir l’épouser.
Version originale en anglais écrite par Eleanor Abbey Traduction – Céline Pilon (2021)